Greenpeace c. Total (2021)

Les Amis de la Terre France, Greenpeace France, France Nature Environnement, France Nature Environnement PACA, France Nature Environnement 13 et la Ligue de protection des oiseaux PACA ont déposé une requête devant le tribunal administratif de Marseille, portant sur une demande en annulation de la décision préfectorale du 16 mai 2018 autorisant la société Total à poursuivre l’exploitation de la raffinerie de La Mède et la transformant en bioraffinerie.

Les associations considèrent que l’avis de l’autorité environnementale est entaché d’irrégularité car adopté par une autorité dénuée d’autonomie. Elles estiment aussi que l’étude d’impact méconnaît les dispositions de l’article R. 122-5 du Code de l’environnement en ce qu’elle est entachée d’insuffisance nuisant à l’information et influençant la prise de décisions. Elle est insuffisante, car elle ne prend pas en compte l’analyse des effets indirects venant de l’approvisionnement du projet. De plus, elles arguent que l’arrêté ne respecte pas les dispositions de la directive 2009/28/CE relative à la promotion de l’utilisation de l’énergie produite à partir de ressources renouvelables. Enfin, elles considèrent que l’arrêté est entaché d’erreur manifeste d’appréciation en ce que le préfet encourage directement la production de biocarburant à risque de fort effet indirect de déforestation. 

Le 1er avril 2021, le tribunal administratif de Marseille, annule partiellement l’arrêté, considèrant qu’il est entaché d’irrégularités viciant la procédure et ayant pour effet de nuire à l’information complète de la population ou de nature à exercer une influence sur la décision de l’autorité administrative. Il relève deux vices et rejette les autres moyens soulevés par les requérants. 

Il considère que l’autorité environnementale n’a pas pu rendre son avis en disposant d’une autonomie réelle à l’égard de l’auteur de la décision attaquée, ce qui entraîne un vide de procédure. De plus, s’il estime que l’étude d’impact n’a pas à prendre en compte les lieux de production d’huiles végétales, il considère que le volet de l’étude d’impact sur les effets sur le climat ne prend pas assez en compte les effets de l’utilisation de l’huile de palme dans le fonctionnement de la raffinerie. Il relève que l’utilisation de l’huile de palme présente des impacts négatifs sur l’environnement en raison du risque de changement indirect dans l’affectation des sols découlant de sa production. Le tribunal estime, compte tenu de son impact sur le climat, qu’une analyse des effets directs et indirects de l’utilisation d’huile de palme aurait dû être menée. Il précise que la notion ne saurait être “entendue de manière strictement locale dans le seul périmètre immédiat du projet”. 

Le tribunal considère que l’arrêté a fixé la limite maximum d’huile végétale utilisée à 450 000 litres. Il juge la limitation insuffisante pour réduire les atteintes à l’environnement. 

Ainsi, le tribunal annule partiellement l’arrêté en raison de la limitation insuffisante et demande à ce que le préfet impose une limitation dégressive sur l’utilisation de l’huile de palme, après que l’étude d’impact ait été complétée par le volet climat et soumise par la suite à la procédure habituelle d’adoption. Il précise aussi qu’une autorité environnementale indépendante doit rendre un avis. 

Le tribunal sursoit à statuer et donne neuf mois au préfet pour prendre l’autorisation modificative.  

Romane Noubel